Toutes choses scintillant, Véronique Ovaldé

"En fait, mon père n'est pas mon père". Comme en témoigne l'incipit, comme toujours, ça démarre fort chez Véronique Ovaldé. Nous voici pour cette fois transportés à Koukdjuak, une île polaire périphérique délaissée des hommes et du monde.

Complètement délaissée ? Non, puisque des hommes du continent sont venus y installer une mystérieuse déchetterie, qui paraît être à l'origine de phénomènes étranges et dangereux. "Tout cela avait bien sûr à voir avec l'usine".

D'abord, les poissons, qui se sont retrouvés en masse le ventre en l'air. Puis, les oiseaux - qui avaient mangé trop de poisson empoisonné. Ensuite, les chiens. Tout ça à cause de la vieillie usine désaffectée et de sa Nodamycine toxique.

"Il y avait peu de visiteurs dans nos contrées. Nous avions l'impression que sur le continent notre existence avait été soigneusement biffée. Nous ne savions pas très bien si c'était une chose bonne que cette amnésie - au moins ils ne pensaient pas revenir avec leurs fûts de toxine". 

Nikko, une petite fille de Koukdjuak, la dernière survivante d'une bien curieuse année, grandit tant bien que mal entre sa soeur géante, ses pilules jaune-vert-rose, et ses parents pas très jojo - un père violent, et une mère effacée. Elle n'a qu'un rêve : s'échapper de l'île. Un défi pas si simple. "Quand tout s'est brisé à l'intérieur, ça a fait un bruit très délicat de carillon.

Avec ce roman qui tire plutôt du côté de Les hommes en général me plaisent beaucoup que de celui de Et mon coeur transparent, Véronique Ovaldé séduit toujours. Cette petite Erin Brockovitch polaire, on retrouve un personnage féminin très abîmé et qui a, comme toujours, quelques comptes à régler avec son père (voir Ce que je sais de Vera Candida) forcément déglingué.

Virtuose de la narration et conteuse hors pair, Ovaldé parsème ce récit horrible de paillettes de merveilleux et de poésie, et entraîne son lecteur dans sa langue à la verve inimitable. Pour autant, j'ai été un tantinet moins sous le charme que pour mes premières lectures : le côté obstinément déglingué, quelques ficelles un peu récurrentes, peut-être ? Reste qu'on a là affaire à l'une des voix les plus originales de la littérature française contemporaine, et que je fais un peu la difficile.



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