Yeruldelgger, Ian Manook - Crime raciste à Oulan-Bator


Des yourtes, des steppes, des Chinois, un flic sur le retour : le cocktail avait de quoi plaire. Phénomène de l'automne 2013, Ian Manook, nouveau-venu du roman policier, avait misé sur le polar "ethnique", dépaysant par son cadre marqué par l'altérité sinon par l'exotisme (voir par exemple l'enquêteur aborigène d'Arthur Upfield).

Comme Napoléon Bonaparte - le policier précité, le commissaire Yeruldelgger, sait lire toutes les traces, en bon connaisseur de la steppe mongole dont il est originaire. Des bas-fonds d'Oulan-Bator avec ses milieux extrémistes, aux villes minières contrôlées par les entreprises chinoises, en passant par les étendues planes où vivent les semi-nomades sous leur yourte, Yerludegger navigue en eaux troubles pour tenter de résoudre deux affaires plus ou moins liées : un triple meurtre qui semble lié à des mobiles racistes, et la mort d'une fillette européenne victime d'un accident, retrouvée enterrée dans la province périphérique du Khentii. Le tout sur fond de conflit familial, entre un beau-père infect, une épouse disparue, et une fille en rébellion ouverte, prête à tout pour provoquer son père. Heureusement qu'il est secondé par l'attachante inspectrice Oyun, et soutenu par la superbe médecin légiste, qui lui reste indéfectiblement fidèle en dépit de son caractère ombrageux, colérique et vengeur.

"C'est toi qui m'inquiète, Yeruldelgger. Il semblerait que tu sois en train de perdre pied."

Intérêt du cadre évidemment, de par son décalage. Même s'il y un côté "la Mongolie entre tradition et modernité", Manook met en scène les mutations rapides de ce pays méconnu, qui est tout sauf figé ; investi par les sociétés étrangères avides de ressources, ou par les oligarques russes en mal de sensation, la Mongolie change à toute allure, comme en témoigne l'explosion urbaine d'Oulan-Bator où les bidonvilles sont constitués de yourtes entassées autour de la ville. Pourtant, pour moi, la mayonnaise ne prend pas tout à fait : personnages manquant d'épaisseur, aux réactions brutes et téléphonées ou manquant de logique, grandes formules grandiloquentes sur la vie, malgré quelques très beaux passages sur la steppe exposée à tous les vents. Pour un autre roman policier en Mongolie, lui aussi habité d'une ambiance très spéciale, je recommande l'étonnant Sarah Dars, Des myrtilles dans la yourte.

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