Seul dans Berlin, Hans Fallada



Nous sommes en juin 1940, à Berlin, et l’heure est à la célébration du succès fulgurant de la campagne de France. L’Allemagne est, en 1940, victorieuse sur tous les fronts, et la dictature nazie est déjà bien établie.

Nous suivons les destins de différents personnages vivant dans un même immeuble : un couple assez âgé, a priori pas hostile au régime, mais que la mort de leur fils sur le front de l’Est va peu à peu faire évoluer ; une vieille dame juive vivant dans la peur depuis la déportation de son mari ; une famille hitlérienne convaincue, dont deux fils sont SS. D’autres personnages, comme la jeune fiancée idéaliste, ou les indicateurs louches de la police politique, gravitent autour d’eux.

C’est un roman assez intéressant car il évoque un sujet à ma connaissance assez peu abordé, celui de la résistance allemande au nazisme ; un ton intéressant également, puisqu’il s’agit d’un roman écrit juste après la guerre, c’est-à-dire quasiment « sur le vif » par un auteur, Hans Fallada (de son vrai nom Rudolf Ditzen), assez peu traduit en français, qui a vécu lui-même sous ce régime. J’avais déjà lu un roman de lui l’année dernière, Quoi de neuf petit homme ?, que j’avais apprécié pour son talent à décrire la vie, les rêves et les aspirations des « petites gens » de Berlin dans les années 1930.

Une histoire des gens ordinaires, en somme, et on retrouve cet aspect dans Seul à Berlin. Cette résistance-là n’est pas celle des actions spectaculaires et des sabotages ; c’est la résistance des cœurs et des esprits, l’acte même de résister qu’Hans Fallada essaye d’étudier.

C’est aussi un roman sur la dictature, qui se déroule dans un climat de plus en plus oppressant, où l’on lit (assez rare là encore) des détails sur la vie quotidienne des Allemands pendant la guerre, dont les conditions pratiques ne cessent de se dégrader. Fallada y décrypte avec une précision glaçante les mécanismes d’un régime qui anéantit toute individualité et toute indépendance d’esprit, et de ce point de vue le texte est passionnant … et même assez effrayant (le moral en prend un coup).

Un bon roman donc, où le récit peut aussi être compris comme une sorte de parabole et un hommage à toutes les résistances.

Le siège de la Gestapo, en ruines, en 1945

Tout à fait par hasard, quelques jours après avoir terminé le bouquin, je me trouvais à Berlin, une ville qui me passionne littéralement et où je ne me lasse pas de retourner. J’ai visité « Topographie des Terrors », un musée récemment remanié, ouvert sur les ruines de la tristement célèbre n°8 de la Prinz-Albrecht-Strasse, siège de la Gestapo à partir de 1933, lieu autour duquel tourne une grande partie de l’histoire. Le musée, qui concerne l’histoire du nazisme, est captivant, très bien documenté, dans une muséographie moderne, et il s’agit d’une visite que je recommande vivement (pour plus d’informations sur le musée, c’est par ici).

Commentaires