Le jardinier d'Otchakov, Andreï Kourkov



C'est sûr, vous ne regarderez plus les jardiniers de la même manière après avoir connu celui d'Otchakov. Encore une fois, Kourkov dresse le portrait cynique et désenchantée de l'ex-URSS, en plaçant cette fois-ci son intrigue à Irpen, en périphérie de Kiev.

"Notre pays est passionnant, notre époque est passionnante, nous sommes passionnants".

Igor, jeune adulte désoeuvré, s'associe à l'étrange Stepan, jardinier pour le compte de son père, dont il décrypte le tatouage à demi-effacé. Les voilà sur la piste du père de Stepan, à Otchakov sur le rivage de la mer Noire, et de son associé, dans la maison duquel ils découvrent des valises anciennes, remplies de billets, de bijoux ... et d'un uniforme ancien de la milice soviétique. Igor enfile l'uniforme qui est tombé dans son escarcelle lors du partage du prodigieux butin ... et le voilà propulsé dans l'Otchakov de 1957, une aventure qui ne le laissera pas indemne.

"Igor accéléra le pas. Sur ses lèvres, un sourire tendu ; dans son esprit et dans son coeur : l'impatience. Impatience de se trouver dans un autre monde, un monde derrière les fenêtres et les visages desquels se devinait une autre manière de penser. Les gestes et les mouvements de ce monde laissaient transparaître une énergie différente, tandis que dans les yeux de ses habitants brillaient un entrain, une joie, ou une gravité qui n'avaient rien de commun avec le présent".

Belle maquette toujours (pensez aussi aux chouettes poches les Piccolo, comme Surprises de Noël, du même auteur chez le même éditeur), et beaux choix éditoriaux toujours, la marque de fabrique de Liana Levi est bien là.

Certes, il y a toujours le talent de Kourkov, qui parvient à mettre de la banalité dans l'étrangeté (et inversement), ces personnages attachants (Igor, Kolian le hacker, Valia la rousse poissonnière), et ce ton mi-grinçant mi-désespéré qui n'est qu'à lui. Pourtant j'avoue avoir été un peu déçue par ce dernier opus de Kourkov - surtout par une première moitié qui se fatigue (et fatigue vite), tandis que le roman retrouve du souffle sur la deuxième partie. Peut-être en attendais-je trop ? Une lecture qui me rapproche néanmoins un peu plus de mon Objectif lune.

"Les êtres humains, selon leur rapport naturel au monde et à la nourriture, se partagent en deux catégories : les jardiniers, et les forestiers".

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