1959. Michel a douze ans, une mère inflexible, une petite soeur odieuse, un père entourloupeur, un grand frère en cavale et son ex-petite amie sur les bras. Michel joue au babyfoot, emprunte des disques, sèche les cours et "H4" et déploie une redoutable inventivité pour échapper au surgé.
C'est alors que Michel pousse la porte de l'arrière-salle du Balto, le bistrot auvergnat où il a pris ses habitudes ; et le voilà qui pénètre dans un tout autre univers, exclusivement masculin, une sorte de "club" d'exilés de tous les horizons de l'Europe de l'Est (superbe citation de Dante d'ailleurs qui clôt le bouquin "Tu sentiras, bien loin de Florence et des nôtres, qu'il est dur de monter par l'escalier des autres, et combien est amer le pain de l'étranger !")
Commencée début novembre, lecture retardée pour divers motifs (notamment un poids trop grand du livre le soir, le soumettant à un malencontreux effet de gravité non lié à l'intérêt du bouquin).
Car c'est tout simplement un REGAL ! Une lecture savoureuse que l'on retrouve le soir avec un indicible plaisir, qu'il est difficile de lâcher pour éteindre la lumière, un roman dans lequel on se sent bien, des personnages pour lesquels on développe une véritable affection ... Que demander de plus ?
On navigue entre chronique adolescente et portrait de génération, et le roman entremêle avec bonheur les destins de Michel, de ses amis du Club des incorrigibles optimistes (l'inoubliable Leonid, l'étrange Sacha, l'inénarrable Igor, le fantaisiste Imré, et bien d'autres), Cécile la fiancée de son frère, sa petite sœur Juliette ("Quand elle a une idée en tête, Juliette est capable de répéter vingt fois la même demande, de revenir à la charge sous des formes différentes. Elle pratique, de façon innée et avec succès, la technique du laminage par épuisement"), et la jolie Camille. Empreint d'humour et de nostalgie, le récit emporte un lecteur ravi d'y naviguer.
Les années 60 revivent et font sourire au travers de l'éveil de Michel : "Il fallait ruser, faire preuve d'imagination et d'astuce pour contourner la dictature du bien dégagé derrière les oreilles. Je n'étais pas seul. L'épidémie avait atteint d'autres élèves. On se retrouvait entre nous. On était entrés en résistance. On avait l'impression de vivre dans une cocotte-minute et qu'ils nous empêchaient de respirer. Ca chauffait mais le couvercle tenait bon. Un bras de fer interminable. On occupait le terrain. Chaque avancée était une petite victoire. Chaque défaite renforçait notre détermination. On savait qu'on allait gagner. On était les plus jeunes, chaque jour plus nombreux. Ils finiraient bien par crever".
On retrouve les personnages un peu comme si on les connaissait, et on les aime tous un peu ; le ton est drôle et enlevé, on ne s'ennuie pas une minute. Un bien joli cadeau de Noël (de l'année dernière, il est vrai !).
Avec, en prime, la recette du goulasch : "Le vrai goulasch se fait avec du boeuf, surtout pas de porc. C'est les pauvres ou les Autrichiens qui prennent du porc. Gîte ou paleron. Cinq cents grammes d'oignons frais, du paprika doux, une grosse cuillère à soupe de chaque, du cerfeuil frais haché fin, de l'origan, du poivre de Cayenne, deux poivrons, cinq cents grammes de tomates. Il faut des galuskas, des petites pâtes hongroises".
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