Hamaguri, Aki Shimazaki

La rentrée étant ce qu'elle est, j'en suis venue à délaisser honteusement le blog ces dernières semaines ... en conséquence de quoi, les livres lus (à un rythme certes moindre que pendant les vacances) mais non "billetisés" s'accumulent en un joyeux bazar sur mon bureau, s'ajoutant aux livres déjà non "billetisés" de cet été ... bref, il y a une bonne file d'attente, avec une bonne dizaine de livres qui s'impatientent à l'idée d'être décortiqués et disposés sous le feux des projecteurs !


Je me lance donc avec Hamaguri, un court roman (une centaine de pages) japonais d'Aki Shimazaki, que j'ai lu ces jours-ci dans le tram. Ce livre s'insère dans une série, intitulée Le poids des secrets, qui compte en tout cinq volumes, et que j'ai découverte il y a deux ans au travers du premier "tome", Tsubaki. Du coup, j'ai acheté la série entière, dans une de mes librairies favorites, "Le Bleuet" (plus d'informations par ici), une caverne d'Ali Baba située à Banon, une libraire comme on en fait plus ! Le libraire m'a confirmé dans mon choix puisque lui aussi adore Shimazaki. Le poids des secrets est édité dans la jolie collection de poche d'Actes Sud, Babel, avec de très belles couvertures qui traduisent bien, selon moi, l'esprit de Shimazaki. Il faut enfin savoir que les volumes de cette "série" peuvent tout à fait se lire indépendamment les uns des autres.

Ce qui est captivant chez cet auteur, c'est la grâce de ces récits, leur légèreté, comme si ceux-ci flottaient telles des fleurs délicates et fragiles. Les histoires (en tous cas dans les deux premiers tomes) sont celles d'enfants ou d'adolescents, inscrits dans des rapports familiaux complexes, renvoyant souvent à des questions de filiation. Ces jeunes grandissent, mais gardent toujours en eux cette blessure et ces secrets de l'enfance, qui toujours se révèlent trop tard, à la fin de leur vie. En filigrane, comme un non-dit pourtant bien présent, le drame des deux bombes atomiques ayant frappé le Japon en 1945.

Yukio, un petit garçon calme, est élevé par sa mère célibataire, qui travaille dans l'orphelinat d'une église chrétienne. Il est ami avec une petite fille, Yukiko, sa compagne de jeux au jardin. Les deux enfants scellent un pacte, qu'ils enferment, tel un secret, sous la forme d'un message caché entre les deux moitiés d'un coquillage (hamaguri, la palourde japonaise). La mère de Yukio se marie et déménage avec son fils à Nagasaki, un évènement qui va bouleverser le fragile équilibre de Yukio. Il y a chez Shimazaki quelque chose de la tragédie grecque, mais en japonais. Un style épuré, presque dépouillé mais poétique et léger, une chose est sûre : le charme opère. Pourtant, la construction comme le style sont sans doute moins riches que dans le premier tome, Tsubaki, qui me paraît meilleur pour qui veut aborder cet auteur.

Commentaires

  1. Ah la littérature japonaise, ça m'attire énormément. J'adore Murakami, sa littérature poétique qui navigue entre réel et irréel et tout ça avec une sensibilité incroyable, c'est du grand art! Dans ce domaine, je manque de références donc si tu as d'autres choses à nous proposer, n'hésite pas ;-)

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  2. J'aime bien les Japonais aussi. Ici, ce n'est pas du tout le même genre que Murakami, mais il n'est pas impossible que cela puisse te plaire. Je suis une ardente partisane de Murakami (Haruki). Qu'as-tu lu de lui ?

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  3. Pas mal de choses à vrai dire: Kafka sur le rivage, La course au mouton sauvage, Danse danse danse et La fin des temps.
    J'aime beaucoup la finesse de son écriture et sa façon d'aborder les sentiments humains, toujours avec beaucoup de justesse. Même si cela peut paraître parfois un peu long et surtout lent en terme de rythme de lecture.

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  4. Tu as lu beaucoup de ses romans "A", car il y a un style "B", un peu moins délirant mais aussi plus profond. Ce sont les titres que tu trouves publiés par 10/18 (alors que ceux que j'appelle les A sont chez Points, ne me demande pas pourquoi) : la ballade de l'impossible, le passage de la nuit ... Plusieurs recueils de nouvelles intéressants aussi : après le tremblement de terre, l'éléphant s'évapore, au sud de la frontière à l'ouest du soleil, entre autres. Sinon, un autre Murakami, mais celui-ci, c'est Ryu. Là, ça bouge beaucoup plus, c'est un peu le Japon underground : les bébés de la consigne automatique par exemple : assez dur, ça secoue, mais c'est intéressant (même si mon préféré reste indubitablement Haruki, qu'en fait j'ai découvert par mégarde en cherchant un autre Ryu pour approfondir !)

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  5. J'ai déjà lu les deux premiers. C'est vraiment superbe! J'aime beaucoup le fait que l'histoire s'entremêle. On apprend à chaque fois de lourds secrets. Le fait que cela soit en plusieurs tomes compense la brièveté du roman (j'aime bien quand c'est un peu long, cela permet de véritablement rentrer dans l'histoire). Le style est très épuré mais les sentiments des différents personnages y sont décrits avec beaucoup de justesse. Et puis j'aime cette vision du Japon où rien ne se dit et où la violence est souvent silencieuse et les secrets les plus inavouables bien cachés. Pour résumer, c'est une bien belle découverte pour moi.

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  6. je suis drôlement contente que tu accroches, même si, honnêtement, je ne l'aurais pas parié !

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