Hollywood, Palerme, Piergiorgio di Cara

Où les mamans reconnaissent les amoureux au premier coup d’œil ;

Où l’on déplore le fait que les menus des pizzerias fassent maintenant 7 pages, et où l’on finit quand même par prendre une margherita aux champignons ;

Où « dans la police, celui qui joue bien au foot est déjà un demi-dieu » ;

Où Palerme, la nuit, est une ville différente ;

Où le dimanche après-midi passe injustement vite ; et où le lundi les collègues mangent à l’œil.



L’incipit


« PLAN UN

La caméra cadre une montagne pelée, tachée d’un vert sombre profond, rare, fond brun de roche.

Une inscription blanche, gigantesque :

HOLLYWOOD

En musique de fond, un blues déchirant.

La caméra élargit le champ : maisons aux angles de vieux vases ébréchés. Murs rouges et blancs délavés. Impression d’une grande confusion. On dirait une Los Angeles mexicaine.

C’est Palerme. »


Comment en suis-je arrivée là ?


J’avais découvert Piergiorgio di Cara sur les conseils de mon collègue d’histoire (ces collègues qui lisent, c’est terrible !), et j’avais tout de suite accrochée à la trilogie : Ile noire / L’Âme à l’épaule / Verre froid qui raconte les aventures et les états d’âmes d’un flic antimafia (que je vous recommande chaudement) dans la très belle (et bonne) collection « Noir » de Métailié. Aussi me suis-je jetée sur Hollywood Palerme dès sa sortie !


De quoi s’agit-il ?


Ici, point de Riccobono ou de division antimafia, nous voilà à la Brigade criminelle de la PJ palermitaine. Nous suivons les pas de Pippo Randazzi, un inspecteur qui a vu son renez-vous galant interrompu par l’appel d’un collègue à propos d’un meurtre sordide. Une mère de famille a été défigurée à coups de marteau dans sa cuisine ; une partie de son corps est ébouillanté et le meurtrier est parti avec un morceau de son crâne.


La citation


« Un de ces étés absolus comme il y en a seulement en Sicile. Absolus parce qu’on a la sensation d’être libéré du temps. Un soleil qui semble peint, un ciel si bleu, au point de disparaître, une mer si bleue qu’elle paraît violette. Qu’elle ressemble à du vin, dit Sciascia. Un de ces vins rosés et forts qui ont enivré le Cyclope, qui vous chauffent l’estomac et vous allègent la tête, l’enveloppant dans une symphonie de cigales, comme le clapotis de l’eau contre la quille d’une barque » (p. 62)


Ce que j’en ai pensé


Evidemment, présenté comme ça, ça a l’air un peu glauque, mais en fait ça ne l’est pas tant que ça, ou du moins, ce n’est pas le propos exclusif du livre ; comme dans la série précédemment citée, l’intrigue policière est presque secondaire (quoique très bien ficelée), et représente presque une sorte de prétexte pour connaître les personnages et explorer leurs émotions. Ils sont attachants, humains, touchants et fragiles … le policier sicilien quoi ! (il y a aurait dans la littérature policière de quoi faire une catégorie « inspecteur / commissaire méditerranéen » !). Le récit a son propre tempo, sa respiration presque, et il est rythmé par les références régulières à l’installation de l’inscription « Hollywood » sur les collines de Palerme. On baigne dans l’ambiance du commissariat, ses histoires au quotidien, un rythme et un travail de fou au détriment de toute vie sociale et sentimentale. Peut-être un peu moins réussi que les précédents, mais cela reste très bien et de bonne facture dans l’écriture (voir les belles descriptions de Palerme, de la nuit …). On dirait bien que Di Cara est parti sur une nouvelle série, et c’est tant mieux !


Paru en italien en 2010 – en poche chez Métailié Noir, 10 euros – 202 pages.

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