Victoria et les Staveney, Doris Lessing


Où les mères célibataires noires n’ont pas la vie facile ;

Où les grands blonds façon James Dean font des ravages ;

Où il vaut manifestement mieux être caramel qu’être chocolat



Mais pourquoi je lis ce livre ?

Ma maman me l’a chaudement recommandé, et qui plus est me l’a prêté. Je me suis donc aussitôt attelée à la lecture.


De quoi s’agit-il ?

A Londres, Victoria, petite fille noire issue d’un milieu très populaire, passe par hasard la nuit chez les Staveney, une famille blanche bourgeoise ouverte, libérale et bien pensante. Quelques années plus tard, elle croise à nouveau le chemin du fils de famille, et une enfant métisse naît de leur union. Victoria et sa petite Mary sont amenées à fréquenter les Staveney, de plus en plus impliqués dans l’éducation de Mary, ce qui laisse à Victoria un sentiment ambigu.


La citation

« La question de la couleur de peau … non, on ne pouvait y échapper, même si Victoria était pardonnable de croire que les Staveney – en dehors de Thomas, bien sûr – n’avaient jamais remarqué qu’il pouvait s’agir d’un facteur de différence, et même souvent polémique, tant ils étaient persuadés que tout ce qui avait pu se produire (malheureusement) dans le passé n’avait plus aucune influence sur les affaires humaines » (p.121)


Ce que j’en ai pensé :

Une analyse intéressante et enlevée du racisme ordinaire et des clivages sociaux persistants dans la société britannique contemporaine. La critique est acerbe, et militante, comme elle l’est d’ordinaire chez Lessing. Ses personnages, et notamment Victoria, y font l’expérience d’une douloureuse lucidité qui tourne parfois au cynisme et à la désillusion amère : le fossé existe toujours et il est bien réel. L’incompréhension entre les groupes et les individus pèse sur tout le roman, et toute communication semble impossible. Un constat finalement assez pessimiste.

J’ai pourtant trouvés meilleurs d’autres romans de Lessing, et ce Victoria et les Staveney n’a à mon sens pas tout à fait la force des fabuleuses Grands-mères ou d’Un enfant de l’amour, où les sentiments étaient analysés avec une justesse rare. Dommage aussi que la mise en place soit un peu longue pour en parvenir au cœur du propos. Mais sans doute vaut-il mieux lire ce court roman comme une forme de parabole, construite autour de la critique sociale.

Paru en 2008. Flammarion, 150 pages, 14.50 euros.

Commentaires

  1. Pascale Gérard5 août 2010 à 23:30

    Je ne suis pas tout à fait d'accord avec ton analyse. Tout d'abord, comment ne pas évoquer cette exquise couverture? Il est vrai que des framboises et des mûres, je raffole...
    Ensuite, je trouve qu'un livre sur le racisme sans n'en jamais parler... Tant de finesse, de délicatesse.. Entre cette première scène chez les Staveney, époustouflante dans la fracture entre 2 mondes et cette deuxième partie, certes amenée lentement, mais il faut ce temps pour mesurer l'inexorable glissade de l'enfant...
    La Maman qui a prêté le livre

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  2. J'ai lu "Le rêve le plus doux" de Doris Lessing pendant les vacances. Le livre évoque la jeunesse d'après guerre en Angleterre, dans les années 60 (jusqu'au début des années 90) à travers l'histoire d'une famille et en particulier de deux femmes, Julia la grand-mère et Frances la belle-fille. J'ai trouvé le livre un peu long (630 pages en livre de poche et pas mal de longueurs) mais pas déplaisant. Il y a beaucoup de personnages donc on s'y perd assez vite. J'ai adoré le personnage de Julia, la grand-mère d'origine allemande. Le livre décrit cette jeunesse éprise de liberté après les deux guerres. J'ai lu "Victoria et les Staveney" avant de partir cet été, j'ai donc emmené avec moi un second roman pour poursuivre la découverte de cet auteur.
    Madeline

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  3. Je suis contente que tu commentes "Le rêve le plus doux" car il stagne dans mon étagère "à lire" depuis un bon bout de temps ... je vais suivre ton avis et me lancer, enfin, dès que j'aurais fini mon pavé (L'Inconsolé, d'Ishiguro)

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